Notion de cadre – Quel travailleur peut être considéré comme cadre ?
La notion de « cadre » n’est pas définie dans le Code des obligations (CO) ou une autre loi. La notion la plus proche est celle de travailleur exerçant une fonction dirigeante élevée, mentionnée à l’art. 3 let. d de la Loi sur le travail (LTr), sans toutefois qu’on puisse parler exactement de synonymes.
L’art. 9 de l’Ordonnance 1 relative à la loi sur le travail (OLT1) définit la notion de fonction dirigeante élevée de la manière suivante : « Exerce une fonction dirigeante élevée quiconque dispose, de par sa position et sa responsabilité et eu égard à la taille de l’entreprise, d’un pouvoir de décision important, ou est en mesure d’influencer fortement des décisions de portée majeure concernant notamment la structure, la marche des affaires et le développement d’une entreprise ou d’une partie d’entreprise. »
Cette notion est donc sujette à interprétation – laquelle doit être faite de manière restrictive – et il sied d’examiner la situation au cas par cas, d’après la nature réelle de la fonction ainsi qu’en tenant compte des particularités et dimensions de l’entreprise. Il ne faut pas s’arrêter au titre utilisé par les parties.
Quelques exemples sont fournis dans le Message relatif à la LTr (FF 1960, p. 925) : les directeurs et chefs d’entreprise (mais non les contremaîtres), les associés d’une société en nom collectif autorisés à représenter celle-ci, les associés indéfiniment responsables d’une société en commandite, les membres du conseil d’administration d’une société anonyme, d’une société à responsabilité limitée ou d’une société coopérative.
Cela étant, le critère déterminant est celui de la possibilité de prendre des décisions pour l’entreprise ou une partie de l’entreprise, qui sont de nature à influencer fortement l’avenir de l’entreprise ou sa structure. Le montant du salaire, le pouvoir d’engager l’entreprise par sa signature, le fait d’avoir d’autres travailleurs sous ses ordres sont de bons critères, mais ne suffisent pas en soi à conclure à une fonction dirigeante élevé (cf. Commentaire de l’ordonnance 1 relative à la loi sur le travail, art. 9, 109-1, SECO, novembre 2006).
Au vu de ce qui précède, on examinera infra la situation du « cadre dirigeant » ou « cadre supérieur ».
Heures supplémentaires des cadres dirigeants – Doivent-ils renoncer à la compensation de celles-ci ?
A titre liminaire, on rappelle que, si la LTr prévoit une obligation de rétribuer le travail supplémentaire, tel n’est pas le cas du CO. S’agissant ainsi des cadres dirigeants, auxquels la LTr ne s’applique pas, les parties ont dès lors davantage de liberté en matière de rétribution ou non du temps supplémentaire consacré à l’employeur.
Selon le Tribunal fédéral, on peut attendre des cadres dirigeants qu’ils fournissent, en qualité et en quantité, une prestation plus importante que la norme en usage dans l’entreprise.
Ainsi, en règle générale, les cadres dirigeants n’ont pas droit à la rétribution des heures supplémentaires, car le surcroît de travail est compensé par un salaire de base plus élevé (respectivement par un bonus annuel ou par des vacances additionnelles) et qu’ils disposent d’une plus grande liberté dans la répartition de leur temps de travail.
Cette règle ne saurait être applicable aveuglément dans tous les cas de figure et un examen au cas par cas est souvent requis. Ainsi, même si l’usage est bien établi, nous recommandons de prévoir le principe de la renonciation à la compensation des heures supplémentaires par écrit dans le contrat de travail, conformément à l’art. 321c al. 3 CO.
Cette renonciation ne peut porter que sur les heures supplémentaires à venir.
Toutefois, une rétribution des heures supplémentaires réalisées par les cadres dirigeants sera due dans certains cas (cf. ATF 129 III 171, consid. 2.1 ; TF 4A_38/2020, consid. 4.1) :
- Lorsque la rétribution des heures supplémentaires est expressément prévue dans le contrat ;
- Lorsque les parties ont expressément prévu contractuellement un nombre d’heures de travail sans exclure le principe de la rétribution des heures supplémentaires par écrit ;
- Lorsque le cadre dirigeant a assumé des tâches excédant son cahier des charges ;
- Lorsque l’ensemble du personnel a dû accomplir un nombre considérable d’heures supplémentaires pendant une certaine durée (relativement longue) ;
- Lorsque le cadre dirigeant a fourni des heures supplémentaires excédant notablement ce qui était prévisible lors de la conclusion du contrat ou de l’accord.
Conclusion
Ainsi, en résumé, le premier point est de déterminer si l’employé est un cadre dirigeant ou non, sans s’arrêter au titre utilisé par les parties, mais en fonction de sa possibilité de prendre des décisions qui vont influencer la situation de l’entreprise.
Si l’employé est un cadre dirigeant, il n’aura en principe pas droit à la rétribution de ses heures supplémentaires, car il est tenu du fait de sa position à fournir une prestation plus importante et qu’il perçoit déjà en compensation un salaire plus élevé ou d’autres avantages.
Dans la mesure où un examen au cas par cas est souvent nécessaire, il est préférable de prévoir expressément la situation dans le contrat de travail.